La violence engendrée par les groupes armés du pays, ceux de la capitale en particulier, ne cesse d’augmenter. En conséquence, l’avenir devient de plus en plus inquiétant.
Les gangs sont désormais partout, multiplient les attaques, les scènes de pillages et plongent, en majeure partie, les résidents de Port-au-Prince et de certains autres endroits du pays dans la peur. Les déplacements, risqués, demeurent l’une des décisions prises par une grande partie de ceux qui ne peuvent plus affronter cette nouvelle réalité. Ces personnes laissent pratiquement tout derrière elles pour aller se réfugier dans certaines villes de provinces épargnées pour le moment. Olga*, une étudiante de 22 ans dont la présence à Port-au-Prince est principalement motivée par ses études, a fui la capitale quelques semaines après les premières tentatives exercées par les groupes armés en vue de prendre le contrôle du palais national.
“Ma mère n’arrêtait pas de s’inquiéter, j’ai dû faire un choix.”
En dépit de ce contexte si pénible, d’autres affrontent au quotidien les dangers. C’est le cas de Jude-Edward, après avoir poursuivi ses études, travaille désormais comme administrateur dans une école.
“Malgré toutes les mauvaises nouvelles, je dois travailler. Sans travail, je ne pourrais pas bien vivre. Le problème lié à l’insécurité a un impact énorme sur tout. Il m’est difficile d’entreprendre des activités, l’argent devient difficile à gagner. Je souffre, et je dois m’assurer de manger chaque jour.”
La crise économique, créée par l’insécurité, a contraint de nombreuses entreprises à ne plus fonctionner normalement. Certaines d’entre elles sont parfois envahies, voire pillées par les gangs. Ce fût le cas de la MSC et de quelques espaces destinés à la vente de voitures, causant ainsi beaucoup de pertes et de licenciements. Marlène* est dentiste. Selon elle, les choses n’ont jamais été faciles à Port-au-Prince, mais elle croit que c’était mieux avant.
“Je travaillais dans une clinique privée, mais quand la situation a commencé à se détériorer, j’ai dû travailler uniquement sur rendez-vous avec les patients. Ça ne marchait pas très bien. Avec la violence qui augmentait, la santé bucco-dentaire, c’était le moindre des soucis des gens.”
Entre passivité et incertitude
Les universités publiques ne fonctionnent presque pas. Les écoles publiques et privées de la capitale ont à peine commencé à dispenser quelques cours. L’attente est grande, mais les efforts sont souvent limités à de simples mots. Dans un contexte où l’état n’est pas présent, l’autorité échappe à ses détenteurs, laissant par conséquent la population seule et aux abois. Parmi les plus vulnérables, nous retrouvons ceux qui font des études. À chaque fois que la situation se détériore et que rien ne fonctionne, ils sont obligés de rester chez eux. Parfois durant des mois entiers.
Thervenson JOSEPH a 18 ans. Il est musicien. Il doit travailler pour financer ses études, mais n’y arrive plus vu qu’il ne peut plus se rendre à “Grande Saline” pour pêcher; ce qui lui fait perdre des années d’études. “Je ne vois pas d’espoir”, a t-il expliqué, très critique envers les dirigeants du pays.
Pour ce jeune étudiant de 21 ans qui a préféré garder l’anonymat, le discours est le même. Il se dit frustré de ne plus pouvoir reprendre ses études et souligne n’avoir jamais quitté sa maison depuis les premiers événements.
“C’est une période de stagnation. On attend sans rien faire, et ce n’est pas par choix. C’est du temps perdu. Rester à la maison est la seule option”.
Aucun changement palpable n’a encore pris forme. Cependant, un nouveau gouvernement composé de neuf membres dont deux observateurs ainsi que d’un premier ministre a pris place. De nouvelles mesures sont annoncées. Rien n’est clair pour l’instant, mais les décisions prises notamment en vue de démanteler les gangs sont encouragées par une grande partie des membres de la population.
[*] Certains prénoms ont été modifiés.
Image de couverture : La violence engendrée par les groupes armés du pays plonge la Jeunesse dans l’Inquiétude. | © Carl Henry Dezinma
Frederson CLAUDE (Étudiant en psycologie) a apporté sa contribution à ce reportage